lundi 28 mars 2016

"L'hermine" de Christian Vincent, avec Fabrice Luchini





L’hermine est une bande de fourrure blanche qui symbolise une haute charge de l’État et qui orne certains costumes d’audience, comme celui de Michel Racine, le Président de cours d’assises incarné par Fabrice Luchini. "Président" et non pas "juge" comme il le répète souvent aux témoins qui l’appelle Monsieur le juge. Ce film aurait pu s’intituler aussi « L’écharge rouge » parce que, au civil, Racine délaisse son épitoge herminée pour se cacher derrière sa grosse écharpe d'un rouge vif. 


L’action

 

 



L’histoire se passe dans une petite ville froide et grise du nord de la France. Michel Racine est un président bourru et aigri, qui n’est pas très aimé dans le milieu. On suit le déroulement du procès d’un jeune homme accusé d’avoir tué à coups de pied son bébé de 7 mois. Ce film est un mélange de pièce de théâtre et de docu-réalité.

Du théâtre, on retrouve tout d’abord, comme un clin d’œil pas très subtil, le nom du personnage : Racine (encore heureux qu’il ne s’appelle pas Molière…). Le procès se joue devant nous comme une pièce de théâtre. Il est vrai que même dans la vie réelle, une salle d’audience est un lieu de drame digne des plus grandes tragédies. Le principal de l’action se déroule dans la salle d’audience, donc on retrouve l'unité de lieu propre au théâtre. On assiste aussi à quelques scènes dans les coulisses de la salle.


Le côté docu-réalité apparait lors des témoignages à la cour. Les témoins à la barre sont tellement réalistes qu’on n’est plus sûr qu’il s’agit d’acteurs. À travers ces témoins, le réalisateur dépeint avec une certaine ironie la société provinciale française. Tout comme il dépeint un arrière-plan social par le biais des discussions des membres du jury:
multiculturalisme, chômage, clivage des classes sociales, tout y passe. Ces conversations à la brasserie du coin semblent être filmées sur le vif. 


Les acteurs

 


Luchini est égal à lui-même, touchant et vrai comme d'habitude, quoique plus sobre qu'à l'accoutumée, gagnant du prix 2015 d'interprétation masculine à la Mostra de Venise. Mais il n'apporte rien de vraiment nouveau. C’est Fabrice Luchini qu’on voit à l’écran plutôt que son personnage.

J'ai eu le plaisir de découvrir dans ce film un nouveau visage d'actrice, celui de Sidse Babett Knudsen (un nom danois plutôt difficile à retenir et prononcer) que je ne connaissais pas, qui crève l'écran par sa beauté naturelle. Quel plaisir de voir un visage de femme mi-quarantaine non défiguré par des injections. Des rides autour des yeux, c'est tellement beau. Elle a un regard et un sourire qui n'ont pas besoin de mots, d'où une économie de dialogues. Elle a remporté le César 2016 pour la meilleure actrice dans un second rôle. 



On aime moins 

 

Ce film a malgré tout un goût d'inachevé, il ne décolle pas, l'histoire reste en surface. On attend un déclic, une étincelle, une révélation, mais rien. On suit le procès, les bavardages insipides des jurés, les témoignages de pauvres gens perdus dans leur quotidienneté. On suit en parallèle une timide histoire d'amour platonique entre le Président de la cour d'assises et une des jurés, une anesthésiste d’origine danoise qui a soigné le dit Président quelques années auparavant. Mais les deux intrigues, la judiciaire et la sentimentale, ne réussissent pas à se rejoindre. Puis on apprend sans même voir les délibérations finales, que le jury a réussi à se mettre d’accord pour acquitter l'accusé. Puis un autre procès commence. Et c'est le générique de fin...

Quel est le but de ce film? De nous confronter, avec un réalisme sociologique mêlé d'une certaine légèreté, à l'appareil judiciaire français, côté cours et côté jury? On dit que Christian Vincent est un héritier de Rohmer. Mais il manque quelque chose. C'est trop linéaire ou trop binaire je ne sais pas. La sauce ne prend pas. Je ne comprends pas le Prix du meilleur scénario à la Mostra de Venise. 



Bref, c’est un film à voir principalement pour les amoureux de Fabrice Luchini et pour découvrir une comédienne hors pair, Sidse Babett Knudsen, qui a un petit quelque chose de touchant à la Romy Schneider.

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