jeudi 30 avril 2015

MON PIRE LIVRE DE L'ANNÉE

En tant que bibliothécaire au traitement documentaire, je fais l'analyse documentaire des livres (indexation, classification, catégorisation, évaluation). L'évaluation consiste à mettre un indice de valeur-utilité allant de 2 à 5. Donc, l'indice 2 est le plus bas et veut dire que le livre est non recommandé, ou en d'autres termes qu'il n'est "pas bon". En l'espace d'une vingtaine d'années, je n'ai pas eu l'occasion de mettre souvent cet indice. Le dernier remonte à plusieurs années parce que l'ouvrage était truffé de fautes d'orthographes. Derrière chaque livre, il y a un auteur qui y a mis tout son cœur et parfois même toute son âme. Alors j'essaye de rester objective et de toujours trouver du positif dans chaque livre. Mettre un 2 peut avoir des conséquences sur la vente du livre puisque cela peut dissuader les bibliothécaires d'acheter le document pour leur bibliothèque ou aussi décourager l'usager qui fait sa recherche dans le catalogue d'une bibliothèque publique.

Dans ce roman de l'écrivaine anglaise Natalie Young, une femme mariée malheureuse tue son mari d'un coup de pelle. Ne sachant quoi faire du corps, elle décide de le couper en morceaux, de cuisiner chaque partie et de le manger tout en écrivant une suite de conseils pour éviter un mariage malheureux. L'auteure a voulu faire une espèce de satire sociale sur fond d'humour noir mais le problème est que la sauce ne prend pas... Ce n'est pas drôle du tout, même pas un coin de lèvre qui bouge, sauf pour un rictus nauséeux. Le roman de Young est comme un plat froid et écœurant qui donne plus envie de vomir que de sourire. Vraiment aucun plaisir de lecture. Luka Magnotta, notre dépeceur national macabrement célèbre, c'est de la guimauve comparé à cette meurtrière cannibale dépressive, sans sentiment et sans remord, qui continue de vivre normalement après avoir digéré son mari. Peut-être l'histoire se veut une métaphore -- pas très subtile -- de la femme qui mange ses émotions, mais c'est complètement raté.

Et je me demande quel est l'intérêt d'écrire de telles abominations, même derrière l'alibi de la fiction et de l'humour. Le but de la lecture est de nous apporter quelque chose de positif, une joie, une compréhension du monde, de soi, un divertissement, un plaisir. Ce n'est pas de nous apporter du dégout et de l'aversion. Et j'ai toujours la crainte aussi que de tels livres donnent des idées à des personnes déséquilibrées.

Donc, indice 2 inévitable = livre à ne pas acheter ni emprunter. Et faire un billet - même négatif - sur ce roman, c'est déjà trop.

Laurence D.

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Young, Natalie. "Assaisonnez à votre goût, ou, Comment cuisiner votre mari". Neuilly-sur-Seine : M. Lafon, 2015
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2 commentaires:

  1. Commentaire de Philippe Dupourqué du 3 mai 2015:

    "Pas de panique l'année ne fait que commencer et tu as encore le temps de trouver pire!

    Pourtant le titre est plutôt alléchant si on le lit sans s'attacher au sens littéral : on peut "cuisiner" à la manière policière...


    Par ailleurs je crois que, dans le domaine de la barbarie individuelle ou collective, la réalité dépasse toujours la fiction.

    La plus grande difficulté pour un écrivain est non pas de décrire des horreurs physiques en en rajoutant à la pelle mais surtout de rendre la profondeur des conséquences mentales et psychiques qu' engendrent ces horreurs.

    Il ne suffit pas d'écrire pour être un bon écrivain."

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  2. En fait, il ne s'agit pas du pire livre de l'année mais DE LA DERNIÈRE DÉCENNIE !!!

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